La prothèse bionique:prothèse contrôlée par le cerveau

La prothèse bionique:prothèse contrôlée par le cerveau

TEMOIGNAGE. Le premier homme à avoir reçu une prothèse contrôlée par son cerveau

Ce Lituanien de 21 ans est né avec une malformation congénitale l’empêchant de se servir de ses mains. Il a pu bénéficier d’une reconstruction bionique.

Dans sa cuisine, Martynas Girulis ne tient pas en place. Il se sert à manger, pique avec une fourchette quelques pommes de terre d’une casserole et les dépose dans son assiette. Il se verse un verre d’eau qu’il boit ensuite à l’aide d’une paille. © PETRAS MALUKAS / AFP

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Tendre le bras pour se verser un verre d’eau, saisir une fourchette : ces gestes simples sont désormais possibles pour Martynas grâce à une prothèse bionique, lui qui est pourtant né avec une malformation congénitale l’empêchant de se servir de ses mains. Ce Lituanien de 21 ans est le premier homme au monde qui se soit fait remplacer un bras, inerte, par une prothèse bionique que son cerveau contrôle, selon son chirurgien autrichien. La médecine a fait d’importants progrès ces dernières années dans le domaine des prothèses bioniques, mais jusqu’à présent les cas rapportés dans la presse spécialisée concernaient tous des amputés.

« Reconstruction bionique »

MALFORMATION. Il y a quelques mois encore, Martynas Girulis avait les deux bras constamment pliés aux coudes et totalement inertes. « Il est le premier patient souffrant d’une malformation congénitale à bénéficier d’une reconstruction bionique », affirme à l’AFP le docteur Oskar Aszmann, qui a opéré le jeune homme à Vienne le 4 novembre 2014.

Spécialiste de la chirurgie nerveuse et des extrémités depuis vingt ans, le chirurgien autrichien a développé le concept de « reconstruction bionique » et procédé à une première opération en 2010. Martynas Girulis, né avec de l’arthrogrypose, une maladie neuromusculaire interdisant tout mouvement de rotation et de flexion, aux bras et dans une moindre mesure à ses membres inférieurs, n’a pu marcher qu’à l’âge de six ans, au prix de six opérations très lourdes réalisées en Lituanie et en Suède. Mais il avait toujours besoin d’une tierce personne pour ses activités quotidiennes.

« Très récemment, nous avons vu de nombreuses améliorations pour augmenter l’habileté des prothèses de bras et collecter un retour sur la sensibilité. Les possibilités d’améliorer la vie des personnes handicapées semblent très prometteuses », indique à l’AFP le professeur Silvestro Micera à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, qui développe ces bras sensibles.

Commander cette main c’est comme commander un hélicoptère »

PROTHÈSE. Grâce à internet, Martynas Girulis a découvert le service du professeur Aszmann, spécialisé dans la reconstruction bionique à l’université de médecine à Vienne. Trois ans et demi plus tard il recevait sa prothèse.

Avant d’amputer son bras droit inerte pour faire de la place pour celle-ci, il a fallu transplanter des nerfs au niveau de l’épaule pour permettre au jeune homme de disposer des influx nerveux commandant le bras. En raison de sa pathologie, il ne dispose que de deux influx nerveux, au lieu de six normalement. Il a également dû muscler son épaule une année durant, et reçu des muscles prélevés sur sa cuisse.

« Commander cette main c’est comme commander un hélicoptère », explique le jeune homme, toujours un sourire aux lèvres. Pour cela, il a dû s’entraîner, en particulier avec une main virtuelle sur un ordinateur, qu’il devait faire bouger par la pensée, tout en contrôlant sur un autre écran son activité musculaire, à l’aide d’électrodes. A chaque mouvement de son bras, un léger « bip » l’informait du mouvement en train d’être effectué. « Ce qui me réjouit aujourd’hui, c’est la possibilité de faire des petites choses : prendre une fourchette, me tenir dans le bus », dit Martynas, qui suit par correspondance les cours de terminale, avant peut-être de se lancer dans des études de psychologie.

PRIX. Le coût de la prothèse bionique (92.000 euros) et de l’amputation (5.000 euros) a été pris en charge à 80 % par la caisse maladie de Lituanie. Oskar Aszmann a déjà reçu d’autres demandes semblables à celle du jeune Lituanien.